AutoPortrait








À Naïma

Ce fut d'abord une étude.
J'écrivais des silences, des nuits, je notais l'inexprimable.
Je fixais des vertiges.
Arthur Rimbaud
Une saison en enfer


Peindre un tableau c'est comme écrire un poème, attraper le vent :
“des ailes pour planer au-dessus de la vie” écrivait Vincent Van Gogh.
Il faut assumer sa part de folie, peut-être cela qu'on nomme la sagesse.

Je suis née à Zurich. Passionnée par la calligraphie arabe, la cartographie, les graffitis... j'ai "toujours" peint.

Je travaille avec des moyens simples : pigments, toile ou tout autre support de fortune. Je ne sais pas à l'avance ce qui va se passer.
J'aime fouiller derrière les apparences, déceler des présences,
inventer l'occulte...
Je peins le monde, en toute subjectivité :
comme je le vois, comme je le découvre en peignant.

Au début c'est une sorte de chaos, de magma.
Je triture, je rature.
Chantier de fouille archéologique, art chaos-logique...
La toile infuse lentement.
Une image entrevue en amène bientôt une autre.
Le tableau se construit, strate après strate,
des évènements se font jour.

N. K.


formation

1978-1982

École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris

1985-1986

Kala Institute, Berkeley, Californie


expositions de groupe

2015

Galerie autour de l'image, Lyon, France

2009

Hôtel de l'univers, Saillans, France

2008

Le Belvédère, Saint-Martin d'Uriage, France

2004

Galerie Taoa, Crest, France

2003

Espace Saint-Martin, Paris : Le printemps des singuliers

2000

Prieuré de Manthes, Drôme, France

1999

Funabashi city gallery, Japon
Art Space Rashinban, Tokyo, Japon

1998

Outsider Art Fair, New York
Judy A Saslow gallery, Chicago : Far out'98,
Halle Saint-Pierre, Paris

1996

Altstadt galerie, Berne

1995

Galerie Hamer, Amsterdam

1993

Musée de la poste, Paris : Timbres d'artistes
Site de la Création Franche, Bègles : Les jardiniers de la mémoire

1991

Musée de la poste, Paris : Les guichets de l'enfance

1990

Musée de la poste, Paris : Coups d'envois ou l'art à la lettre
Galerie Pixi et Cie, Paris : Rouge écarlate

1988

Centre Georges Pompidou, Paris : Paysage : parcs urbains et suburbains, exposition de dessins à l'encre, publiés dans les cahiers du CCI, éditions du centre Pompidou


expositions personnelles

2016

Nouveau Palais de Justice de Lyon
Galerie Autour de l'image, Lyon

2014

Hôtel de l'univers, Saillans

2013

Galerie Alter-Art, Grenoble

2012

Théâtre Am Stram Gram, Genève
Musée de la Création Franche, Bègles

2011

Esprits Animaux, l'Orangerie, Montéléger

2007

Galerie Prise de tête, Romans, France

2005

Galerie Artactua, Le Mans

2000

Am Platz galerie, Eglisau, Suisse : Twilight

1999

Galerie Jonas, Petit-Cortaillod, Neuchâtel, Suisse

1998

Galerie d'Origine, Lyon
Altstadt galerie, Berne

1997

Altstadt-halle, Zoug, Suisse
Trubahus galerie, Azmoos, canton de Saint-Gall, Suisse

1995

Galerie Avantgarde, Mannheim, Allemagne
Galerie Michel Lagarde, Paris
Trubahus galerie, Azmoos, canton de Saint-Gall, Suisse
Galerie Jonas, Petit-Cortaillod, Neuchâtel, Suisse

1994

Alabama, Musée Adzak, Paris
Galerie du Ressort, Paris
Galerie Hamer, Amsterdam
Galerie Bad Schinznach, Suisse

1991

In Harlem streets, Galerie Art'o, Aubervilliers
Le couloir des ancêtres, la petite galerie, Paris

1986 à 1994

Publie de nombreux dessins à l'encre dans Le Monde diplomatique, Le Monde de l'éducation, etc. Anime la chronique du Totopiok (texte et image) dans le mensuel L'autre Journal et Dada, revue d'art pour enfants.


En ce monde nous marchons
Sur le toit de l’enfer
Et regardons les fleurs.

                                     Issa Kobayashi (1763 - 1828)


Natasha Krenbol appartient à la génération des enfants, ou plutôt des petits-enfants, de Jean Dubuffet et de poètes comme Henri Michaux.

Alimentée aux sources du blues, du jazz, et des musiques ancestrales de tous les vieux continents, elle fait partie de ces artistes dont la culture mondiale, et le sang, mêlé, semblent porter la mémoire de tous les peuples en voie de disparition : la famille des poètes, volontairement primitifs et cosmopolites, de “ Mother Earth ”, actuellement en grand danger. Pas étonnant si son œuvre, nourrie du contact avec les terres de la vie simple, ouvre naturellement des frontières qui, à ses yeux, devraient être effacées depuis longtemps.

Chemin faisant, une autre vie du mental lui est devenue familière. “Hasards objectifs ”, signes, rencontres, sont pour elle la trame d’un quotidien devenu mystique, dans une époque où c’est la vie elle-même qui est surréaliste.

La peinture est, pour elle, un engagement total, une façon de vivre, de respirer, comme la musique, qui partout l’accompagne et constitue le fil conducteur de son œuvre. Ce sont justement d’autres airs, d’autres mélanges qu’elle nous propose à voir, dans ses toiles si vivantes où tout danse et tout bouge, toute une culture qu’elle porte partout avec elle, comme le conteur itinérant sa mythologie personnelle.

Animaux, plantes, humains, créatures imaginaires, tous les êtres se valent dans l’univers de Krenbol, où le petit et le grand ont la même importance aux yeux du Créateur. Et on y sent une tendresse particulière pour les mille petits détails, essentiels, qui font tout le charme et le miracle de l’existence. C’est un univers d’un animisme naturel, où la vie suit son cours, à son rythme, têtu et obstiné, comme l’âne, compagnon privilégié de Krenbol.

Là, réside le secret de ce qui donne à ces œuvres tant de vie : dans la surimpression d’au moins deux mondes, deux préoccupations, à la fois opposées et complices, comme dans l’existence. La poésie retrouve l’espace de se donner libre cours, et l’on sent la fraîcheur d’une libre et talentueuse improvisation: celle qui, comme en musique, sait associer le “feeling”, le don, et ce sens très particulier de l’équilibre que développent les grands vivants, à force de parer les coups à droite et à gauche.

Laurent Danchin

écrivain, critique d’art
mycelium-fr.com


la pulsation Krenbol

Par le jeu de la "réserve",1 les créatures de Natasha Krenbol, tels des fragments de réel provisoirement détachés du monde, paradent graffitées et maculées - malpolies, pour le moins. Leurs poses dansantes d'animaux enjazzés laissent deviner le sourire qui accompagna leur invention (parlons plutôt de révélation).

Cette peinture chahuteuse, carnavalesque, est le fait d'une personne bouleversée, comme l'est nécessairement quiconque sachant voir que l'homme marche sur la tête. Nos effigies sont plus vivantes que nous; plus animales et musicales, plus amicales. Contrairement à nous, nos doubles krenbolisés ne tuent pas, ne saccagent pas, ne se rêvent pas en prédateurs. Ce sont d'authentiques sauvages, habitants d'Utopie, ce non-lieu de toujours, villégiature nomade des poètes et des sages résistants.

Natasha Krenbol a manifestement plus appris des rues africaines que des musées de la vieille Europe. Elle tient les conteuses de fables et les bluesmen pour plus savants que les esthètes bourgeois, et peint en oeuvrière non-alignée, insoucieuse des vogues et des diktats boutiquiers. Elle a été saxophoniste dans une vie antérieure et jalouse les corbeaux.

J'ai acquis récemment une de ses toiles montrant deux aveugles se guidant l'un l'autre dans le chaos. Avisant cette image, impressionnante de sauvagerie, un artisan de passage me déclare, solennel : "ça pulse". On ne saurait mieux dire.

1 Rappelons que la "réserve" désigne, en peinture, la surface qui ne reçoit pas de teintes comme, en gravure, celle qui est protégée de la morsure de l'acide. Silhouettes et figures sont ici "réservées" sur le fond, généralement mouvementé et couru d'inscriptions diverses (quand ce n'est pas imprimé, comme dans le cas des timbres, dont Natasha Krenbol détourne par planches entières les images d'origine).

Enzo Cormann, mars 2007
écrivain, homme de théâtre
www.cormann.net